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22 avril 2011 5 22 /04 /avril /2011 19:00

L’hôpital de Mongo

Pour la deuxième fois depuis mon arrivée au Tchad, j’ai l’occasion de revisiter les locaux de l’hôpital de Mongo. Suite à une montée soudaine de fièvre qui m’a tout de suite fait présager une crise de paludisme, je n’ai pas hésité à suivre la procédure obligatoire dans ces cas là : faire le test de la goutte épaisse. Un drôle de nom pour un test qui en dit autant : l’infirmier vous pique le doigt avec une petite aiguille et recueille une petite goutte de sang qu’il analysera par la suite pour vous donner les résultats à 11h. Pour moi, résultat négatif, il ne s’agirait semble-t-il que de déshydratation. Retour à l’hôpital pourtant le lendemain, pour m’assurer à nouveau, car j’entends dire que le test de la goutte n’est pas 100% fiable tout autour de moi ! Même refrain à nouveau, le test est négatif. Pourtant je souffre de maux d’estomac très gênants qui ne me laissent pas tranquilles et m’ont tout l’air de parasites qui seraient venus se loger sans me le demander dans mon estomac.

Alors troisième visite à l’hôpital. Passage par l’entrée pour abonner les 1000F de frais d’examen. Pas toujours une mince affaire de se faire sa place dans ce bureau minuscule et de prendre son tour, car pas de règle en vigueur sinon celle du plus fort, le premier arrivé n’est pas le premier servi ! Ensuite, direction le bureau du surveillant général, un poste que je ne comprends toujours pas. Ce monsieur, fort aimable, se contente de transposer par écrit sur un bulletin le test que vous avez demandé vous-même, car ici la règle de l’automédication  est d’or. Je lui décris mes symptômes et mes doutes sur leur origine et il acquiesce, m’envoyant alors faire un examen des selles pour vérifier la présence des parasites. Une fois l’examen réalisé, arrive l’heure de la prescription, c’est pour en rire. Au regard de mes résultats, j’ai donc, sans grande surprise, des parasites ou bactéries dans l’estomac, mais mystère est gardé sur leur nom ! Seraient-ce des amibes ? Des verres ? Des champignons ? Je n’en saurais rien car après avoir pausé maintes fois la question que tout patient est en droit de se poser « qu’est-ce que c’est docteur ? Qu’est ce que j’ai ? », je n’ai reçu pour unique réponse « Prenez le traitement, après ça vous irez mieux ! ». Et parlons-en de ce traitement, 17 pastilles à avaler par jour, une prescription bestiale qui ne considère en rien mon poids, ici même dosage pour tout le monde, enfants comme grands ! Résultats d’une telle analyse : une semaine de souffrance,  des maux d’estomacs encore plus intenses et un traitement que j’ai dû arrêter à mi-parcours de peur de m’empoisonner !

L’hôpital de Mongo est finalement plus un lieu de rencontre qu’un centre médical. A l’entrée, dès l’aurore, on assiste à une déferlante de femmes hadjaray (femmes des montagnes) qui attendent patiemment sous un soleil déjà brulant (actuellement la journée débute par 28°C à 5h du matin, et les degrés augmentent ensuite comme des secondes….) de pouvoir rentrer dans l’enceinte de l’hôpital pour aller rendre visite à un patient. Car ici, un malade n’est jamais laissé seul. Même si vous avez 50 degrés de fièvre, votre chambre est prise pour centre de réunion tupéroires, et pas seulement la chambre, d'ailleurs est-ce qu'on peut appeler une pièce de 8m2 avec pour seul meuble "parfois" un lit en faire datant d'avant l'ère coloniale, ou bien une natte par terre, dans lequel on a dû mal à distinguer le patient des visiteurs, une chambre d'hôpital? je me demande comment tiennent toutes seules les perfusions? Dehors donc, on se croirait au quartier, une dizaine de femmes assises sur le sol, cuisinant la boule et le thé comme si elles étaient à la maison, causant de la pluie et du beau temps, veillant sur le malade et faisant aussi leur vie sociale, car ici pas de mari derrière elle pour leur demander de s'accroupir dans les fourneaux.

Services disponibles: consultation générale où on ne vous envoie jamais ou presque consulter un médecin puisque c'est le surveillant de l'hôpital qui fait les prescriptions :-), pédiatrie, maternité, chirurgie (ne préfère même pas penser comment cela doit être!!!!), labo. Latrines condamnées pour odeur nauséabondes repoussant les patients et les visiteurs à rebrousser chemin et à faire leurs excréments dans l'enceinte même de l'hôpital derrière les latrines normalement réservées à cet usage mais impénétrable par manque d'entretien ou de bonne volonté? Question à se poser: quelles conditions d'hygiène pour un hôpital où cohabitent ordures ménagères, résidus, patients, puits?

De nombreux patients n'atteindront jamais ce "miraculeux" centre hospitalier puisqu'un des grands fléaux du Tchad est son taux d'analphabétisme. Grand nombre de personnes meurent avant même d'arriver au centre de santé car attendent la dernière minute pour y aller, une fois que les symptômes sont devenus irréversibles ou bien ne suivent pas les indications des prescriptions faites, car ne savent pas lire, et s'empoisonnent ou empoisonnent leurs enfants par une overdose de médicament!

On se souvient alors du dicton: "el remedio es peor que la enfermedad" (le remède est pire que la maladie en elle même ou mieux vaut prévenir que guérir) et il est si vrai ici.....

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